Nous, les organisations signataires, exprimons notre consternation quant au fait que le Tribunal militaire de garnison de Beni n’a pas encore annoncé de verdict dans l’affaire des 13 défenseur·e·s des droits humains (DDH) de la LUCHA de Beni, au Nord-Kivu. Selon les statuts juridiques, ce verdict devait être rendu dans les 30 jours suivant l’audience finale du tribunal, soit le 8 février 2022. Ce retard injustifié constitue une violation du droit des 13 défenseur·e·s à un procès équitable et à une procédure régulière, tel que proclamé par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples conformément à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Nous demandons instamment aux autorités congolaises d’abandonner les charges sans conditions et de libérer les 13 DDH de la LUCHA, qui sont privés de leur liberté depuis 4 mois.
Pour rappel, les 13 DDH ont été arrêtés et détenus le jeudi 11 novembre 2021, alors qu’ils organisaient une manifestation pacifique pour dénoncer les tueries et massacres répétés de civils qui persistent malgré la proclamation de l’état de siège dans la province du Nord-Kivu et dans la province de l’Ituri. Les 13 DDH sont jugés en vertu du code pénal militaire, un processus qui suscite l’inquiétude en raison de la sévérité potentielle du verdict de la cour militaire. Ils sont accusés d’insurrection, d’incitation à la révolte et de désobéissance à la loi en vertu de l’article 137 du code pénal militaire.
En raison des mauvaises conditions de détention, l’état de santé de trois des défenseur·e·s de la LUCHA s’est sérieusement détérioré. Ils ont été admis dans un établissement médical local, mais leur état reste alarmant et nécessite des soins médicaux adéquats.
Depuis novembre 2021, la société civile nationale, régionale et internationale demande la libération de 13 défenseur·e·s[1]. Cette affaire s’inscrit dans le cadre d’une augmentation inquiétante des menaces, des intimidations, des arrestations arbitraires et des meurtres de défenseur·e·s des droits humains et d’artistes dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, en état de siège depuis mai 2021. En Janvier 2022, la LUCHA a accusé les forces de sécurité congolaise d’avoir tué Mumbere Ushindi, l’un de ses défenseur.e.s lors d’une manifestation[2].
Depuis que l’état de siège a été déclaré, plus de 21 militants de la LUCHA ont été arrêtés. Il est déplorable que la RD Congo soit un pays où les défenseur·e·s des droits humains sont criminalisés pour leur travail. En septembre 2021, cinq titulaires de mandats spéciaux des Nations unies ont écrit une lettre au gouvernement congolais sur la détention des défenseurs des droits humains de la LUCHA, à laquelle ils n’ont reçu aucune réponse officielle[3].
Ces 13 défenseur·e·s n’auraient jamais dû être arrêté·e·s. La protestation pacifique est un droit consacré et garanti par l’article 26 de la constitution de la RD Congo, et le droit de défendre les droits humains est universel. En outre, les 13 défenseur·e·s doivent être reconnus et protégé·e·s conformément à l’édit du Nord-Kivu sur la protection des défenseur·e·s des droits humains. Les organisations signataires condamnent les violations continues et les souffrances subies par les 13 DDH de la LUCHA de Beni et demandent leur libération immédiate.
Organisations signataires :
- Action 54 Sudan
- Actions et initiatives de développement pour la protection de la femme et de l’enfant (AIDPROFEN)
- Agir ensemble pour les droits humains (AEDH)
- Association africaine de défense des droits de l’homme (ASADHO)
- Association d’actions de Paix et de développement communautaire (APADEC)
- Association pour le développement et initiatives paysannes (ASSODIP)
- Broederlijk Delen
- Bunge Mashinani Initiative
- Coalition des Volontaires pour la Paix et le Développement (CVPD)
- Defenders Coalition Kenya
- Ethiopia Human Rights Defenders Center
- Haki Africa
- IDAY-International
- Justice et Paix
- Kalkal Human Rights Development Organization (KAHRDO)
- La Coalition des Femmes Défenseures des Droits Humains (CFDDH)
- Lliga dels Drets dels Pobles
- National Coalition of Human Rights Defenders Uganda
- Ökumenische Netz Zentralafrika (ÖNZ)
- PAX
- Pax Christi International
- Protection et solidarité
- Protection International
- Protection International Africa
- South Sudan Human Rights Defenders Network
- Synergie des Femmes pour la Paix et la Réconciliation des peuples des Grands-Lacs d’Afrique (SPR)
- Synergie Ukingo Wetu (SUWE)
- Tournons La Page RDC
- Women Human Rights Defenders Hub in Kenya